Salah ZAOUIYA A GAGNE SON COMBAT JUDICIAIRE

  • Au bout du chemin la vérité: l'Etat Français et l'administration pénitentaire sont enfin  reconnus responsable de la mort de Jawad


    article paru ds le Monde, mercredi 17  déc 2008

    Douze ans que ce père attendait cette décision de justice. Douze ans que Salah Zaouiya tient droit, debout, auprès de son épouse anéantie par la dépression, pour faire reconnaître la responsabilité de l'Etat dans la mort de leur fils de 19 ans, Jawad, en 1996, dans l'incendie d'une cellule à la prison de Bois-d'Arcy.

    Le Conseil d'Etat a donné raison à la famille, mercredi 17 décembre, à l'issue d'une longue bataille judiciaire. "C'est fini. Je suis ému. On m'avait toujours dit que je battais contre un mur. Il est tombé. Le combat continue pour les autres détenus", a confié M. Zaouiya.

    Jawad avait été placé le 12 juillet 1996 en détention provisoire, à la suite d'incidents avec des policiers dans son quartier du Val Fourré à Mantes-la-Jolie (Yvelines). Il partageait une cellule de 9 m2 avec deux autres détenus. Le 23 juillet, en pleine nuit, l'un d'eux a déclenché un incendie. Il était 1 h 20. La porte de la cellule n'a pu être ouverte qu'à 1 h 35. Quand le SAMU est arrivé à 2 h 05, Jawad et son codétenu incendiaire, asphyxiés, étaient morts depuis au moins 25 minutes.

    En 2004, le tribunal administratif de Versailles avait reconnu la faute de l'Etat : "L'administration a fait courir à Jawad Zaouiya un risque spécial qui l'a privé d'une chance de survie."

    En 2006, la cour administrative d'appel de Versailles avait confirmé la responsabilité de l'administration et accordé une indemnité de 15 000 euros aux parents. La cour avait invoqué l'"ensemble de circonstances à caractère fautif", responsable de "la perte d'une chance de survie" de Jawad.

    Le Conseil d'Etat a a validé toute l'appréciation des faits et le raisonnement tenu par la cour d'appel, et rejeté le pourvoi du ministre de la justice, Pascal Clément.

    Le "danger provoqué par la combustion des matelas en mousse", comme "la fréquence des incidents provoqués par des détenus enflammant leur matelas, étaient connus de l'administration pénitentiaire sans que celle-ci ait mis en oeuvre de dispositions préventives appropriées" souligne l'arrêt.

    Sont aussi en cause, l'absence d'aération de la cellule et "l'impossibilité pratique et matérielle pour le surveillant de nuit d'accéder rapidement au matériel de lutte contre l'incendie". Ce n'était pas, comme M. Zaouiya l'a souvent entendu de la part de l'administration depuis douze ans, "la faute à pas de chance".

    Nathalie Guibert







     REBONDISSEMENT........douze ans de procédure..........bientôt la fin.............

    Rappel du parcours judiciaire

    -juin 97: Dépôt de plainte de la partie civile pour  "homicide involontaire", "entrave à l'arrivée des secours" et "non-assistance à personne en danger", par  le biais de Me de Félice
    -juin98 : Le tribunal de Versailles déclare une ordonnance de non-lieu, la famille fait appel
    -janv 99 : La chambre d'accusation de la cour d'appel de Versailles ordonne un complément d'information et d'expertise sur l'incendie
    -Juin 2004 : Le tribunal administratif de Versailles vient de condamner l'Etat a verser 15000 euros(indémnités pour préjudices) pour dommages, mais rejette l'accusation pour disfonctionnement  de l'A.P, et donc l'absence de fautes, ce qui bien sur n'arrête pas Salah ZAOUIYA dans son combat 
    -2005: La famille dépose  un recours devant la cour européenne des droits de l'homme
    -fév 2006: Arrêt de la cour administrative d'appel de versailles qui condamnait l'Etat pour cumul de fautes
    suite à cette décision, le ministre de la justice se pourvoi en cassation devant le conseil d'état pour demander son annulation
     -12 nov 2008 : audience en  cassation devant le conseil d'Etat, la décision sera rendue dans une quinzaine de jours.....................


    Pascal Clément, le ministre de la Justice,  s'était pourvu en Cassation devant le Conseil d'Etat contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles en date du 2 février 2006 qui condamnait l'Etat pour faute. Après dix ans de procédure, j'étais  parvenu à faire condamner l'administration pénitentiaire pour un cumul de fautes, et donc des disfonctionnements de l'A.P. « D'abord, les gardiens n'avaient pas sur eux les clés de la cellule et n'ont pu intervenir que cinq à six minutes après l'alerte au feu, ce qui a été fatal à deux des trois détenus. De plus, les matelas en mousse ont dégagé des vapeurs toxiques. Ils ont depuis été changés dans toutes les prisons françaises. Enfin, il n'existait pas de système de dégagement des fumées. ». j'avais  obtenu une indemnité de 15 000 euros. « Ce pourvoi en Cassation me donnera l'occasion d'aller plus loin, devant la Cour européenne de justice. Mon combat ne s'arrête pas là », j'ai  un soutien important de  l'Observatoire international des prisons, j'irai jusqu'au bout............
    Le 12 novembre 2008, je me suis rendu à l'audience................VOIR ARTICLES
  • article paru dans le parisien: le 13/11:2008

    La condamnation de l’Etat
    a été recommandée hier au Conseil d’Etat après la mort d’un jeune détenu dans l’incendie de sa cellule à Bois-d’Arcy (Yvelines) en 1996, conséquence d’un « cumul de fautes ». Le ministère de la Justice s’était pourvu en cassation devant le Conseil d’Etat après avoir été condamné à verser 15 000 aux parents de Jawad Zaouiya. 
     
  • article paru dans le monde : le 13/11/2008

    L'administration pénitentiaire a fauté et elle doit être condamnée. C'est ce qu'a estimé, mercredi 12 novembre, la commissaire du gouvernement, Isabelle de Silva, chargée de dire le droit devant le Conseil d'Etat, dans un dossier portant sur la mort d'un jeune homme en prison.
    Le 2 février 2006, la cour administrative d'appel de Versailles avait condamné l'Etat à verser une indemnité de 15 000 euros aux parents de Jawad Zaouiya, en réparation du préjudice subi pour le décès de leur fils. Mais le garde des sceaux, Pascal Clément, avait demandé l'annulation de cette condamnation. Mme de Silva a recommandé au Conseil d'Etat de la confirmer.

    Jurisprudence.
    Au cours des trente dernières années, le Conseil d'Etat a plusieurs fois reconnu la faute de l'Etat dans la mort de détenus. Dans la même période, sous l'influence de la Cour européenne des droits de l'homme, la mise en cause de cette responsabilité a été rendue plus facile. La jurisprudence a remplacé la "faute d'une exceptionnelle gravité" par la "faute lourde", puis par la "faute simple" : l'administration peut être condamnée pour une série de négligences.

 

26 mai 1978. Arrêt Wachter. La faute lourde de l'Etat est reconnue pour un décès dans un incendie de cellule à la maison d'arrêt de Metz.

 

23 mai 2003. Arrêt Chabbah. Responsabilité de l'Etat pour une succession de fautes dans le suicide d'un détenu, à qui son mandat de dépôt n'avait pas été notifié, à la prison de Nanterre.

 

9 juillet 2007. Arrêt Delorme. Suicide d'un mineur placé en cellule individuelle sans accompagnement après sa condamnation, à Angoulême. Faute reconnue pour défaut de vigilance.



Selon elle, un "cumul de fautes" a empêché de sauver Jawad Zaouiya, mort asphyxié à l'âge de 19 ans, le 23 juillet 1996, dans l'incendie de la cellule qu'il occupait avec deux autres détenus à la maison d'arrêt de Bois-d'Arcy (Yvelines). Sans ces fautes, Jawad Zaouiya aurait eu des chances de survivre : "L'argumentation du ministre de la justice ne nous a pas convaincus", a conclu la commissaire du gouvernement.

Jawad Zaouiya avait été placé en détention provisoire à la suite d'incidents avec la police dans la cité du Val-Fourré à Mantes-la-Jolie le 8 juillet 1996. En pleine nuit, l'un de ses codétenus, qui réclamait son transfert dans une autre cellule, avait mis le feu à son matelas. Le matériel de lutte contre l'incendie étant enfermé à clé dans un local, le surveillant de service ne disposait d'aucun moyen d'intervention rapide.

Le règlement prévoit que seuls les gradés peuvent ouvrir les portes des cellules la nuit. Il n'avait fallu que quelques minutes pour joindre le chef, prendre le matériel anti-incendie et accéder à la cellule. Mais il était trop tard. Jawad Zaouiya et l'auteur de l'incendie étaient déjà morts, intoxiqués par les fumées dégagées par les housses du matelas.

 

ENCHAÎNEMENT DE FAUTES

Depuis douze ans, les parents de Jawad Zaouiya mènent une bataille pour établir les responsabilités de l'administration pénitentiaire. Les jeunes de moins de 21 ans doivent être placés seuls en cellule. La prison de Bois-d'Arcy avait dérogé - avec l'accord de l'intéressé, se défend-elle - à cette obligation. Les trois garçons partageaient ainsi 9 m2 "alors que Jawad Zaouiya n'aurait pas dû se trouver dans cette cellule", a souligné la commissaire du gouvernement.

Un enchaînement de fautes, chacune "démultipliant les effets des autres", est en cause, a-t-elle indiqué. L'embrasement des matelas aurait pu avoir des conséquences moins désastreuses si les cellules étaient équipées de dispositifs d'aération. Les prisons n'étant pas des "établissements ouverts au public", rien ne contraint l'administration à adopter une telle mesure. Celle-ci autorise pourtant l'utilisation de réchauds à l'intérieur des cellules. Selon Mme de Silva, l'Etat "a une mission de service public dans le fonctionnement pénitentiaire".

"La cour européenne de Strasbourg devient de plus en plus exigeante vis-à-vis de la responsabilité des Etats dans l'organisation de la vie pénitentiaire", a souligné Mme de Silva. Enfin, la commissaire du gouvernement a jugé "très faible" le montant de l'indemnité allouée aux parents Zaouiya. "Pour la perte d'une vie, cela devrait être mieux évalué", a-t-elle déclaré. Le Conseil d'Etat rendra sa décision dans une quinzaine de jours.


Yves Bordenave





Voir émission TV sur france 3 du lundi 8 déc 2008

http://jt.france3.fr/regions/popup.php?id=b92a_1920&video_number=0


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